Le mot du président : FOLIE

Déjà , en première lecture, le titre : “ Aguirre, la colère de Dieu” , brièveté et brutalité elliptique, allitérations en “ R”, expression d’une violence au-dessus des lois humaines…

Des conditions de tournage brutales et violentes : Werner Herzog le réalisateur et Klaus Kinski dans le rôle d’ Aguirre, hallucinés, mégalomaniaques , paranoïaques – autant l’un que l’autre. Klaus Kinski aussi fou que le personnage qu’il interprète.

Folie de la quête de l’or (le célèbre et mythique Eldorado), folie du pouvoir, folie de l’homme qui se prend pour Dieu, ambition, vbanité… Un monde shakespearien.

Violence et brutalité qui renvoient à la réalité historique : les conquistadors, les massacres, les spoliations, la mise en esclavage des Indiens, l’Eglise – complice et muette (on entend dans le film “ L‘Église a toujours été du côté des puissants” – sic ) , les femmes de l’expédition elles- mêmes asservies. Nature écrasante et hostile : brumes, marais, humidité, pluie, torrents , rapides, végétation luxuriante, étouffante . Un monde qui engloutit. Il n’est pas interdit de penser à “Mission” de Roland Joffé.

Appréciez et savourez la séquence initiale, esthétique remarquable. Quelle introduction ! Premiers plans ; les voyageurs, partis de l’ altiplano péruvien, là où naît l’ Amazone. Le narrateur – un religieux – commente ponctuellement les images. Esclaves indiens (ils tombent dans le vide) , lamas, espagnols caparaçonnés d’acier ( il s’appuient sur leur épée), une femme européenne élégamment habillée au teint de porcelaine, sur les pentes malaisées et dangereuses d’une montagne verticale perdue dans la brume. Peut-être une des plus belles scènes d’ouverture du cinéma.

Et découvrez la dernière séquence du film. Les eaux sont enfin calmes, étales, apaisées . Rats et vers, après les singes ( les vrais vainqueurs ?) …

Bon film !

Jean-Paul DURAND

novembre 11, 2023