Les vacances de M Hulot version 1978 restaurée
Deuxième long-métrage de Tati après Jour de fête (1949), LES VACANCES DE MONSIEUR HULOT est un sommet de burlesque teinté d’une poésie intemporelle. Sa
restauration récente a fait l’objet de soins particuliers. Depuis le début des années soixante, Tati n’a eu de cesse de remonter son film, supprimant ou rallongeant des
plans, retravaillant toute la bande son avec en point d’orgue la réorchestration de la fameuse musique d’Alain Romans.
LES VACANCES DE MONSIEUR HULOT surpasse tout ce qui a pu se faire en matière de tableau de vacanciers. Avec un grand souci du détail, Tati orchestre un ballet
d’estivants en déroulant autant de figures typiques qu’Hulot est atypique : la belle jeune fille, la femme snob, le couple de vieux bien mis, dont le monsieur s’ennuie ferme,
le business man toujours appelé au téléphone, le serveur maladroit, que le patron a à l’œil, toujours en train de râler – en muet ! – dans sa barbe… La galerie de
personnages est la première source de comique qui irrigue le film, à son apogée dans ce défilé des clients derrière le patron de l’hôtel découpant son rôti au premier
plan. Le comique surgit des personnages en eux-mêmes, y compris séparément, et dans la façon dont ils sont mis en scène. Avec un sens du cadre très fin, Tati décrit
une ambiance : drôle, parfois tendre, et surtout très juste. Une ambiance impulsée aussi par un rythme très tenu et l’enchaînement fluide de multiples saynètes, dans un
ensemble où deux scènes – au minimum – se jouent dans une même séquence.
Les trouvailles de Tati sont définitivement passées à la postérité, parce qu’elles sont portés par un personnage rare. Hulot et ses grandes maladresses créent un
personnage attachant et unique, grand créateur de quiproquos et « emmerdeur » malgré lui (son arrivée à l’hôtel dans le vent donne tout de suite le ton). Tati exploite le
comique de geste et de situation comme un inventeur prolixe : scène de la serviette dans laquelle il essuie le poteau au lieu de son dos, canoë cassé en deux que les
vacanciers prennent pour un requin, scène de l’enterrement avec la chambre à air en guise de couronne mortuaire, ou encore voiture mythique et pétaradante.
C’est de ce rythme frénétique que surgit le comique ; du burlesque complet, visuel et sonore. La claque sur la joue d’un gamin, la voix brouillée dans les hauts parleurs
de la gare, la récurrence du son particulier de la porte de la salle de restaurant de l’hôtel… toutes ces ponctuations sonores accompagnent l’image dans un travail de
montage qui lie les deux. Et si le comique visuel doit donc aussi sa force au son, il puise également avec bonheur dans le mime. Ce qu’il doit à cet art muet se retrouve
dans le propre jeu de Tati mais aussi dans celui des autres acteurs : ce sont des pas comme dansés, des sautillements, des exagérations, un côté clownesque. Des
emprunts au mime qui ne s’arrêtent pas aux gestes mais aussi, d’une certaine façon, à l’esprit de cet art théâtral, notamment dans la manière poétique de filmer
l’espace, les jeux avec le sable et la boue, les traces de pas. Une poésie qui, à la fin du film, tire presque sur une certaine tristesse, où personne ne salue Hulot sauf la
dame anglaise…
Mais M. Hulot, c’est aussi l’univers des années 1950-60, c’est-à-dire celui des souvenirs de famille, celui des albums photos de l’époque et des objets ( vêtements,
mobilier, accessoires et outils de la vie quotidienne, moyens de locomotion ) qui dorment dans les greniers.
Alors, voici une proposition pour accompagner le film : essayons d’amener jeudi soir , chacun d’entre nous, des traces de cette époque que nous pouvons retrouver :
photos de vacances, livres et disques (on pourra les écouter, il y aura un « tourne-disques ») vêtements et accessoires de plage, objets du quotidien, etc …comme on les
voit par exemple chez Doisneau (voir photos en fichier joint) pour se faire une petite séquence « comme si on y était ».
Si un peu tout le monde joue le jeu, ça pourra être très sympathique !
En attendant, relayons ces informations autour de nous ; une séance conviviale autour d’un film pas morose du tout, qui dit mieux ?
Bonne semaine et à Jeudi soir.